Déclaration au nom de Sud éducation Guyane, représentant sa fédération aux Rencontres Internationales des travailleurs de Sao Paulo, en septembre 2019

mardi 28 janvier 2020
par  Sud Éducation Guyane

I - Enjeux et positionnement concernant la solidarité internationale

Sud éducation Guyane, comme sa fédération, considère que la solidarité internationale des travailleurs/euses et de leurs organisations syndicales et politiques est un enjeu majeur de la lutte contre le capitalisme. Se référant à la double besogne de la Charte d’Amiens, laquelle affirme la nécessité pour les travailleurs/euses en lutte de construire le syndicat qui sera, dans l’avenir, la base de la réorganisation sociale, nous ne pensons pas construire la société de demain seuls : l’avenir se fera dans la solidarité des organisations de transformation sociale et la mise en place de l’autogestion. La défense des droits des travailleurs/euses n’est pas limité à l’espace forclos de nos frontières. Ainsi notre organisation syndicale partage une vision internationale de l’anticapitalisme et de l’antifascisme.

Sud éducation Guyane s’est investi dans l’avancée de ces luttes en Amérique du Sud et dans la Caraïbes (deux espaces géographiques au cœur des problématiques guyanaises), toujours conscients de notre environnement politique immédiat, en ayant participé au Forum Social Mondial de Bélem en 2008 (délégation Solidaires). De plus, notre syndicat a été un des membres actif du mouvement social de 2017 en Guyane, aux cotés de la population locale, sur tout le territoire (des villes du littoral aux communes de l’intérieur). Membres du KPLD (Kollektif Pou Lagwiyann Dékolé) au sein du Pôle Éducation, nous avons porté avec d’autres organisations syndicales locales, une vision émancipatrice de l’école. Nous étions alors bien sûr aux cotés des militants des peuples autochtones et des peuples issus de la déportation esclavagiste.

Concernant le statut néocolonial de la Guyane au sein du continent, nous assumons une position de lutte active et radicale contre le capitalisme international. Cet ordre, imposé en partie par l’état français et en partie par les dynamiques capitalistes globales, maintien en Guyane une fracture sociale qui isole (en plus de ses doubles frontières) économiquement et socialement la Guyane des autres pays d’Amérique du Sud. La Guyane est une sorte de base avancée de la Forteresse européenne et de ses intérêts en Amérique du Sud. Nous pensons qu’il n’y a pas de nationalisme éclairé : la nation est une invention bourgeoise créée pour convaincre les pauvres de mourir pour les intérêts des riches. Pas de guerre entre les peuples, pas de paix entre les classes.

II - La question frontalière

Pour nous, la première lutte en lien avec l’espace frontalier est celle contre la xénophobie et la stigmatisation des travailleurs/euses immigrés et de leurs familles en Guyane. C’est pour cela que nous faisons partie des organisations fondatrices du Réseau Éducation Sans Frontières, un réseau qui aide les enfants et étudiant/es à obtenir des titres de séjour et des documents d’identité, mais qui lutte également pour la liberté de circulation et la solidarité des peuples à travers la question éducative. Nous défendons la scolarisation de TOUS les enfants présents sur le territoire de Guyane, la gratuité totale de l’école et la construction d’une école émancipatrice respectueuse de toutes les cultures présentes sur le territoire, notamment par la scolarisation en langue maternelle.

Nous luttons également contre une doxa simpliste et raciste des travailleurs/euses des pays frontaliers en nous opposant clairement à la vision de travailleurs illégaux venant piller les ressources naturelles et les aides sociales en Guyane. Ces préjugés caricaturaux ne s’étendent que parce que les contacts inter-frontaliers sont réduits et l’ignorance règne sur le réel statut des travailleurs/euses chez nos voisins, sur leurs conditions de travail, sur la nature globale des flux migratoires. Ce constat motive notre investissement dans la construction de dynamiques syndicales inter-frontalières.

En tant que syndicat de l’éducation, nous soutenons l’idée que les enseignant/es ressortissant/es étranger/es devraient avoir accès au statut de titulaire en Guyane. Nous défendons tous les personnel/les de l’éducation, sans distinction de corps de métier, de genre ou de nationalité.

Nous organisons tous les ans de grandes formations sur les pédagogies alternatives, fondées sur les pratiques autogestionnaires.

III - La dynamique actuelle

Ces dernières années ont été des années riches en élargissement des perspectives politiques :

Depuis 2017 notre syndicat est investi dans la lutte contre l’installation du projet minier de la Montagne d’Or (consortium minier Colombus Gold/Norgold). Nous nous battons aux cotés des organisations des peuples autochtones contre l’exploitation et la destruction de la forêt amazonienne.

Ainsi également, l’élection de Jair Bolsonaro a été pour nous l’occasion d’une première déclaration intersyndicale et interprofessionnelle en décembre 2018. Dans un communiqué à destination de la presse internationale et de nos différentes centrales, trois syndicats guyanais (dont Sud éducation Guyane) ont affirmé leur solidarité avec les syndicats brésiliens dans leur lutte contre le capitalisme et le fascisme incarné par ce gouvernement. L’actualité, depuis, n’a malheureusement que confirmé nos craintes.

Depuis quelques mois, Sud éducation Guyane a accentué le travail de coopération avec ses homologues brésiliens de la région de l’Oiapoque.

En mai 2019, une délégation intersyndicale SNES, SNESUP (pour la FSU) et SUD Education s’est rendue à Oiapoque pour participer à la deuxième journée de mobilisation nationale en faveur de la défense de l’Éducation publique au Brésil.
Un rassemblement a eu lieu devant le monument Marco Zero de la ville. Des professeurs de l’Université, des écoles de l’Amapa et de la ville d’Oiapoque, des élèves, des étudiants et plus largement des lycéens étaient présents.

L’objectif était de manifester notre solidarité avec nos homologues brésiliens et notre inquiétude devant la gravité des attaques du gouvernement Bolsonaro contre l’Ecole publique au Brésil. Il apparaît que les similitudes sont fortes entre les politiques menées dans nos deux pays, inspirées par le néolibéralisme et l’autoritarisme. Des prises de parole et des prises de contact ont pu se faire lors de ce rassemblement.
Après cette belle mobilisation, une première rencontre a eu lieu entre les syndicats brésiliens et français : SINDUFAP section de l’ANDES et SINSEPEAP côté brésilien et SNES SNESUP et SUD Education côté français. Cette réunion de travail fut très constructive. Après avoir dressé un constat sur les problématiques de l’Education des deux côtés de la frontière, nous avons évoqué nos points communs et des pistes de travail pour une convergence et une coopération entre nos organisations syndicales.

Samedi 1er juin, afin de mettre des mots sur nos idées, lors d’une séance de travail deux textes (traduits dans les deux langues) ont été rédigés afin de lancer cette coopération. Ces textes sont une première pierre à l’édifice d’une coopération et d’une convergence solide et forte entre nos syndicats des deux côtés de l’Oyapock.

Nous avons aussi envisagé d’ores et déjà plusieurs événements afin de concrétiser cette coopération :

- Nos organisations syndicales françaises et brésiliennes préparent déjà la mise en place à l’automne 2019 de deux journées de travail à Oiapoque ;
- Nous avons aussi prévu des journées d’étude à Cayenne avec les collègues brésiliens au cours du premier trimestre 2020 avec certainement un moment fort de travail et de formation en commun
- Des thématiques sont définies et méritent d’être complétées, approfondies et enrichies : les réformes de l’Education dans nos deux pays, les droits des peuples autochtones, les langues régionales, l’émancipation sociale par l’école…

Cette coopération est très enthousiasmante pour nous, nous sommes certains qu’elle se révélera fructueuse et efficace pour lutter contre les politiques d’attaque de l’Éducation publique et pour créer des conditions propices pour que l’éducation reste un outil de transformation et d’émancipation sociale.

En anglais


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